Elise venait d’arriver. Elle venait de rentrer de chez elle, enfin, du moins, de ce taudis où vivaient ces parents. L’automne était là, et les feuilles tourbillonnaient au rythme du vent qui s’amusait à soulever l’épaisse chevelure de cette fille au regard venimeux. Son écharpe lui revint dans la figure et d’un geste, elle l’éloigna. Sa valise était portée dans le dortoir, elle n’avait que son sac qu’elle tenait en bandoulière. Elle avait perdue sa sœur de vue pendant le trajet, mais d’après ce qu’elle ressentait, il n’y avait rien de particulier, elle devait d’abord passer au dortoir, elle irait la voir plus tard. Elise sourit. Certes cela était rare, mais elle était contente d’être revenu ici, d’avoir quitté cette misère qui l’a faisait angoisser chaque vacances. Sa mère qui ne cessait de pleure, de hurler, presque proche de l’hystérie, son père, plein d’alcool, puant le vin qui ne cessait de lever la main sur elle, et ces deux sœurs, qui ne disaient plus rien.
Elle marcha encore un peu et finit par trouver un banc de libre, de toute façon, ils l’étaient tous. La cour était vide. C’était le soir. Environ 18h, la nuit était déjà tombée. Elle s’assit sur un des bancs et posa son sac à côté d’elle. Relevant ses cheveux, elle les noua en une seule couette haute. Elise sortit de son sac un paquet de cigarette industrielle. Elle en porta une à ses lèvres et joua légèrement avec son piercing à la langue avec le bout de la cigarette. Ne l’allumant pas, elle sortit de son sac un petit objet noir et fin, un porte cigarette, sur lequel elle planta cette dernière. Puis un briquet, de couleur rouge, facilement remarquable dans un sac de femme qu’elle frictionna. La flamme sortit et vint consumer l’extrémité de ce petit bâton blanc du quel se dégagea une légère fumée.
Première bouffée d’oxygène. C’était certes paradoxal, mais Lise était contente de pouvoir « respirer » de nouveau. Elle s’allongea quelque peu sur le banc, se laissant aller. Dépliant ses jambes, elle les croisa devant elle.
Deuxième bouffée, non vraiment, elle était bien. Son tempérament facilement inflammable semblait pencher pour le calme ce soir, mais rien n’empêchait le sadisme. Elise s’autocritiquait presque, elle se demandait ce qu’elle allait encore foutre chez ses abrutis. Voire ses « parents » comme ça lui donnait limite la nausée, elle n’y retournerait surement plus l’an prochain. Elise était grande désormais, elle et sa sœur prendrais surement un appart quelque part, loin d’eux.
Troisième bouffée, elle pensa rapidement à sa vie. Qu’allait-elle faire plus tard ? Aucune idée. Elle allait peut être se marier, fonder une famille… Cette idée là la fit sourire, quelle idée ridicule, il fallait déjà qu’elle trouve quelqu’un, et pis, son caractère devrait être assez fort pour supporter celui de la jeune femme. Non, elle serait sûrement une solitaire, après tout, cela ne la dérangeait pas vraiment. De plus l’idée de la famille semblait vraiment mauvaise, elle n’avait pas envie de faire vivre à quelqu’un ce qu’elle-même avait vécu. La vengeance ne devait pas s’effectuer dans ce sens, elle devait faire vivre à son père ce qu’il leur avait fait vivre.
Quatrième bouffée. Plus rien, le vide. Une fourmi s’aventura trop près d’elle, elle finit écraser sous une masse de chair rose. Elise pestiféra en essayant d’enlever la bête qui semblait écraser sous son doigt.
Cinquième bouffée, quelqu’un venait. La jeune femme tourna la tête et passa sa langue sur ses lèvres. Tout en recrachant elle regardait le chemin qui tournait, attendant de voir qui faisait ce léger bruit de pas sur le sentier du dortoir, peut être quelqu’un de son dortoir, peut être quelqu’un d’autre. Elle éjecta la reste de fourmi qui était resté coincé sous son doigt et tira encore un peu sur ca cigarette laissant la fumée s’échapper doucement puis la soufflant tout d’un coup. Cette dernière s’éleva puis finit par disparaître emporté par le vent.
Sujet: De retour, en direction du dortoir [libre]