Le Val des Ombres
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 Thalie Alann

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Thalie Alann
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Thalie Alann


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MessageSujet: Thalie Alann   Thalie Alann EmptySam 2 Fév - 21:55

Nom : Alann
Prénom : Thalie, du nom de la Muse de la Comédie. Etrange, non ?
Age : 17 ans
Famille :
Père : Avant la naissance de ses enfants, Gareth était... plutôt louche. On disait qu'il était tueur à gage, ou dealer. Enfin, on ne savait pas trop, mais il était suspect... Peut-être l'est-il resté, mais en tout cas, il n'a jamais parlé de son ancienne vie à ses deux filles. La mort de sa femme l'a énormément perturbé car, malgré les apparences, il l'aimait. Il est devenu une sorte de légume, incapable de se débrouiller seul. Aujourd'hui âgé de 52 ans, il vit aux petits soins d'Euterpe.
Mère : Dans la famille de sa mère, depuis quatre générations, chaque nouveau né de sexe féminin se voit attribuer le nom d'une Muse. Calliope n'échappa pas à la tradition. Malheureusement, la petite Muse de l'Eloquence quitta ce monde, dans un accident de voiture, à l'âge de trente-huit ans.
Soeur : Euterpe, du nom de la Muse protégeant les arts de la Musique. A la mort de leur mère, contrairement à Thalie, elle est devenue une parfaite petite sainte. Aujourd'hui, à 13 ans, elle s'occupe de la maison comme une vraie petite mère de famille, adorable et si mignonne dans ses robes de deuil. Ecoeurant, vraiment.

Description Physique :
« Il était une fois une très belle reine qui voulait avoir un enfant. Un jour froid d´hiver, elle était assise à une fenêtre dont le cadre était en bois noir d´ébène et cousait. En regardant tomber les flocons de neige, elle se piqua le doigt et quelques gouttes de sang tombèrent sur la neige. En voyant cela, elle se dit: "Ah ! Si j´avais un enfant, blanc comme la neige, aux lèvres rouges comme le sang et aux cheveux noirs comme le bois d´ébène !". »
Le souvenir de ce conte lui revint en mémoire. En face d'elle, sur le miroir brisé, tremblait son image. Sa mère avait-elle, elle aussi, souhaité cela ? Si c'avait été le cas, Calliope avait été exaucée.

Elle avança la main, à la peau pâle, presque translucide, pour toucher le verre froid. La fille de l'image fit de même. Ses doigts étaient longs, très fins. Ses ongles toujours naturels étaient coupés un peu irrégulièrement. Pas de soins de manucure, ni quoi que ce soit du même genre. Un étrange tatouage ornait son poignet, d'une forme indéfinissable. Dans le reflet, la fille était agenouillée face à elle. Elle devait avoir seize ans, elle aussi. Ses grands yeux gris bleus la scrutaient et la détaillaient. Qu'ils étaient froid ! Ces deux pupilles aux milles couleurs auraient pû être si belles, si l'on avait pu y lire une émotion. Ses yeux semblaient légèrement voilés, et étrangement inactifs. Cela lui donnait un regard transparent, qui dérivait sans vous voir.
De légères cernes soulignaient ce regard, dûes à des nuits blanches passées à écrire.

Le visage était long. Un front large d'adulte contrebalancé par des joues d'enfant. Cette fille oscillait entre les deux, abandonnant l'enfance sans être tout à fait adulte. Le nez, fin sur l'arrête, mais écrasé au niveau des ailes, était tout aussi pâle que le reste, et ne se remarquait presque pas. La bouche, irrégulière, était d'un rose rouge. C'était la seule différence qu'avait le reflet avec l'enfant du conte. Des lèvres rouge sang, ça n'existe pas.
Au coin gauche de sa bouche avait poussé un grain de beauté. De même qu'à l'extrémité de la joue droite.

Des cheveux d'un noir d'ébène ondulaient le long du visage de la fille agenouillée. Ils descendaient jusqu'au milieu de son dos, se terminant en de boucles mieux formées. La raie n'était pas très droite, un peu sur le côté. Une mèche plus courte lui tombait devant le visage, sans avoir l'air de la gêner puisqu'elle ne la repoussait pas.

Elle n'était pas debout, mais elle paraissait plutôt grande. A peu près un mètre quatre vingt. Elle portait une sorte d'uniforme, noir, parfois égayé de couleurs orangées. Une cravate orange entourait son coup comme un serpent. Sa morphologie était celle d'une jeune fille de son âge. Pas de formes excessives, mais assez bien proportionnée.

L'image se leva soudain, arpentant la pièce du reflet. Ses pieds, malgré la chaleur ambiante, étaient emmitouflés dans d'énormes chaussettes, qui en faisait deux grosses masses informes. Elle avait des jambes étonnamment longues. Lorsqu'elle bougeait, elle semblait pencher légèrement vers la droite, comme si elle allait tomber. Ce n'était pas affreux, mais loin d'être élégant ou charmant. Ses gestes étaient secs, brutaux. Elle n'avait aucun soin pour ces objets qu'elle touchait, cette porte d'armoire qu'elle repoussait, ces vêtements en tas qu'elle jetait sur le lit.
La jeune fille s'assit derrière une table. Ses yeux revenaient toujours vers la paroi de verre poli qui la reflétait. Soudain, elle parut comme métamorphosée. Un morceau de parchemin trônait sur la table. Elle prit délicatement une plume entre ses doigts, et la trempa allègrement dans le flacon d'encre. Elle se mit à écrire, et le bruit de la plume crissant sur le papier sembla la délecter. Elle devenait élégante, aérienne. Ses yeux étincelaient, comme animés par un feu intérieur.

Il se produisit soudain quelque chose d'étrange. Sa main courrait sur le papier, et des images floues, fugitives, apparurent devant ses yeux. Trop rapides, des formes s'ébauchaient à peine, avant de disparaître en fumée, de laisser la place à d'autres. La jeune femme ne se concentrait pas assez sur chaque idée pour les faires apparaître vraiment.

Puis elle reposa sa plume. Tout s'arrêta, sans un bruit, sans laisser une trace. Chancelante, elle revint vers la spectatrice. Elle s'approcha, encore, encore. Leurs deux visages se touchèrent.

Thalie sentit le froid du miroir. Son reflet tremblé lui sourit tandis qu'elle pensait qu'elle était belle. Pour un observateur extérieur, ce n'était pas forcément vrai. Mais Thalie était attirée par son miroir comme un aimant et, à force de s'observer toute la journée comme une étrangère, on finissait par avoir une très haute opinion de soi-même.

Ainsi se voyait Thalie. Mais, en vérité, elle ne voyait plus grand chose. Au fil des années, sa vue était devenue de plus en plus mauvaise, et ses yeux ne captaient presque plus, désormais, les couleurs et la lumière. On avait d'abord essayé de lui faire porter des lunettes ; en vain. Cela ne fit qu'accélérer la détérioration de sa vue. Alors, désormais à moitié aveugle, elle devait se coller à son miroir pour voir son image. Et pour écrire, n'en parlons pas...

Particularité : Thalie n'a que neuf orteils. Pour cacher cela, elle porte toujours des chaussettes, quel que soit le temps. Même ses camarades de dortoirs n'ont jamais vu ses pieds.

Le mauvais côté du pouvoir qu'elle a reçu à son entrée à l'école est qu'il lui abîme, petit à petit, la vue. Au bout de six années, elle ne voit presque plus rien.


Caractère :[J'ai conscience que cette partie n'est pas très développée ; et s'il le faut vraiment, je pourrai allonger ! En général, la partie morale est plus intégrée à l'histoire, pour l'exploiter vraiment Wink]
Euterpe poussa la porte, intriguée. Thalie n'était toujours pas descendue manger. Il était près de vingt-deux heures. Le repas était froid depuis longtemps. Dans l'entrebâillement de la porte, elle aperçut Thalie, prostrée devant son miroir. Le verre était brisé depuis longtemps, mais lorsqu'Euterpe avait évoqué la possibilité de lui en racheter un, sa soeur s'était accrochée à ce grand carré de vide, comme une démenée.
Ahlala, celle là et son reflet ! Euterpe se demandait bien ce qui pouvait tant l'occuper sur cette plaque de verre poli. Elle passait ainsi des heures à se regarder. Ce n'était pas de la coquetterie, puisqu'elle n'était pas forcément très soignée. C'était une sorte de vénération qu'elle avait pour son image. Elle se regardait et se parlait comme si ce reflet était une personne totalement différente et détachée d'elle.
Thalie caressait le visage de la jeune fille sur le miroir, de ses longs doigts fins. Elle murmura d'une voix doucereuse des paroles affectives. Sans un bruit, Euterpe referma la porte, quelque peu ébranlée. Cette fille avait beau être sa soeur, elle faisait parfois froid dans le dos.

Ah, sans cet accident, ils auraient tous vécu bien mieux. Thalie serait restée la petite Blanche Neige, toujours à faire des farces. Papa aurait été capable de travailler et de manger seul. Et elle, Euterpe, aurait pu jouer son rôle de petite soeur sans avoir à endosser celui de mère. Calliope aurait veillé sur tout ce petit monde avec autorité et affection.
Mais si seulement Thalie avait voulu faire payer au monde la mort de sa mère ! Pas le moins du monde. Si la disparition de Calliope l'avait ébranlée, elle était une divine comédienne. Il semblait à Euterpe que si sa soeur se comportait ainsi – froide, ironique, comme insensible et se réjouissant du malheur des autres – c'était à cause de ses pieds. Parfaitement. Elle ne supportait pas avoir à contempler chaque jour un moignon à l'endroit où aurait dû être son gros orteil. Cela gâchait son image, son reflet. C'était l'unique erreur qui venait briser la perfection qu'elle était. C'était la seule honte qu'elle avait. Et c'était ce qui l'avait transformée, plus que l'absence de sa mère.
Il y avait déjà six ans déjà qu'elle était comme cela. A l'époque, Thalie n'était jamais méchante, ou du moins, elle n'allait jamais au bout de ses idées. Mais de la cruauté, elle en avait, et plus qu'il ne lui en fallait... Mais les souvenirs d'Euterpe de cette époque étaient flous, elle n'avait alors que huit ans, et ne remarquait pas le changement de sa grande soeur.

Et puis, elle était entrée à cette école bizarre, elle s'était mise à produire des sortes d'hologrammes effrayants. Euterpe ne comprenait plus rien ; sa soeur lui faisait peur. Gareth lui, en bon légume, ne voyait rien, ne disait rien. Euterpe n'avait pas de refuge. Puis, peu à peu, les voisins, les amis, les commerçants ont remarqué eux aussi. Les premières années, c'étaient des silhouettes floues, sans contour, et qui apparaissaient occasionellement. Puis, d'année en année, de mois en mois, le pouvoir - comme l'appelait Thalie - avait évolué. Euterpe avait remarqué qu'elle voyait de moins en moins les choses. Elle avait essayé de lui faire porter des lunettes, mais la vue de sa soeur ne faisait que se détériorer plus vite.
Aujourd'hui, alors que Thalie entame ce qui serait apparemment sa dernière année à cette école étrange, elle ne voit presque plus. Lorsqu'elle écrit, elle a le nez collé à son parchemin ; mais ce n'est pas comme si cela rendait la vue plus facile. Les formes qui se dessinent devant elle sont presques parfaites, et c'est de plus en plus effrayant pour Euterpe.



Un autre jour, Euterpe entra dans la chambre de Thalie alors qu'elle n'était pas là. Cet endroit, c'était un sanctuaire. Jamais elle ne devait y pénétrer. Et pourtant, régulièrement, elle venait. Son regard erra. Des piles d'affaires montaient jusqu'aux fenêtres. Tout était dans un désordre impressionnant. Telle une petite ménagère, Euterpe entreprit de remettre un peu d'ordre. Elle faisait cela au moins toutes les deux semaines, et Thalie ne se rendait jamais compte de rien. Elle prêtait tellement peu d'attention au monde qui l'entourait ! On aurait pu soulever sa chaise alors qu'elle était encore dessus et la transporter dans une autre pièce, un autre village, un autre pays qu'elle ne s'en serait pas rendu compte. C'est pour cela qu'elle était si désordonnée. Elle avait la tête ailleurs et ne pensait pas à remettre les choses à leur place.
De toute façon, son monde devenant au fur et à mesure de plus en plus gris, de plus en plus sombre, elle ne voyait même plus où elle posait ses affaires ; cela ne facilitait pas le rangement. Euterpe se demandait comment ils se rendraient compte que sa soeur ne voyait plus qu'un écran noir, le jour où cela arriverait.
Alors qu'elle pliait des vêtements sur le dossier d'une chaise, Euterpe remarqua que le bureau, par contre, était d'un ordre maniaque. Les parchemins étaient rangés précieusement. Elle avait rebouché avec précaution les flacons d'encre. Les plumes, lissées avec soin, avaient été disposées par ordre de taille dans un tiroir.

Thalie adorait écrire. C'était sa passion, ce qui la faisait vivre, avec son amour pour son reflet. Ca la métamorphosait, elle devenait une toute autre personne. Ou peut-être était-ce seulement l'ancienne Thalie qui ressortait. Euterpe se souvenait d'elle lui lisant des contes, en inventant, même. Cette passion de l'écriture, la manière qu'elle avait de faire ressortir son imagination débordante, c'était une ouverture vers l'âme de Thalie. Une ouverture que personne ne voulait franchir, pas même Euterpe, sa propre soeur. La première impression que donnait cette fenêtre était belle : un cadre d'or, une vitre polie et bien propre. Une première apparence qui s'appelait « textes », « encre », « papier ». Mais personne n'avait osé ouvrir cette fenêtre, alors la franchir...
On n'osait pas. On se disait que le cadre d'or cachait une âme pleine de noirceur. Etait-ce vrai, était-ce folie ? Qui savait... Une chose était sûre, ce n'était pas de Thalie que l'on saurait ce que cachait son âme.



Pouvoir :
Projection rétinienne

Le Flux de l’infecté change le but des bâtonnets et des cônes de ses yeux (qui permettent de récupérer la lumière et les couleurs de ce qu’il voit), qui deviennent des projecteurs plutôt que des récepteurs. Ainsi, au lieu d’envoyer des images à son cerveau, c’est son cerveau qui transmet ce qu’il imagine. Les yeux de l’infecté s’habituant à cette nouvelle fonction, il en devient petit à petit « aveugle » (selon son âge, il captera de moins en moins les couleurs et la luminosité, entrant petit à petit dans un monde gris sombre, puis noir), et les images qu’il envoie sont de plus en plus réalistes.
Cependant, ces images étant liées à l’imagination de l’infecté, elles sont quasiment impossibles à contrôler, et suivent les mouvements que le projecteur invente. Si la concentration de l’élève passe sur autre chose, l’image changera. Et plus il est concentré sur ce qu’il fait apparaître, plus l’image est précise et contient des détails.

Péché souhaité :
Franchement aucune idée ^^

Année d’étude :
Sixième année.


Dernière édition par Thalie Alann le Dim 16 Mar - 14:23, édité 14 fois
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptyMar 19 Fév - 14:52

Histoire : Le soleil brillait et les oiseaux chantaient, en ce jour de février. Temps annonçant une belle journée - trompeuse. C'était le vingt-neuf février d'une année bissextile. Dans un hôpital, une femme au nom étrange était allongée sur un lit, le visage rougit, les cheveux bruns collés sur son front. Non loin de là, deux infirmières s'extasiaient devant le bébé. C'était une fille. Et tout avait mal commencé... La jeune mère entamait son huitième mois de grossesse lorsqu'elle avait été transportée d'urgence à l'hôpital. A peine né, l'enfant n'avait pas crié. Calliope, qui attendait le hurlement libérateur, avait regardé anxieusement les médecins emmener son bébé. Mais que se passait-il ? Pourquoi lui arrachait-on sa fille ?

Et Gareth qui n'était pas là ! Le père, en effet, manquait à l'appel, le père avait raté la naissance de son premier enfant. On avait du le prévenir, pourtant, il aurait du être là ! Calliope était persuadée que, s'il avait été à ses côtés, elle pourrait serrer son bébé dans ses bras. Il leur avait attiré le mauvais oeil !

Mais déjà, les médecins revenaient. L'enfant respirait normalement, mais, comme on pouvait s'y attendre pour un prématuré, était chétif. Sa hanche s'était mal formée dans l'utérus, mais il n'y avait là rien de grave ; peut-être aurait-elle plus tard une légère tendance à boîter.

Lorsque Gareth arriva enfin, la nuit tombait. Il respirait fort, comme s'il venait de courir. Il voulut s'excuser, mais sa femme lui tourna le dos. Il voulut toucher l'enfant, mais elle se redressa comme une démente, hurla, lui interdit de poser ses sales pattes sur sa fille. Il tenta de la calmer, mais elle cria de plus belle, quelques larmes roulant sur ses joues, alertant les infirmières. La journée avait été dure, pour elle, et elle avait toujours eu les nerfs fragiles. Gareth choisit de se retirer, après une petite discussion avec les infirmières. Il reviendrait le lendemain, et tout serait oublié. Comme toujours, avec son adorable, adorable folle.


Mais, le lendemain, il ne vint pas. Toute la journée, Calliope hurla, pleura. C'était une de ces femmes à la larme facile, à l'angoisse démesurée. Et Gareth n'était pas assez présent pour avoir le pouvoir d'apaiser ses peurs. La jeune femme avait alors vingt-sept ans et, derrière son air naïf, comprenait parfaitement que les activités de son mari étaient louches. Mais elle ne disait rien, fermait les yeux. On la prenait pour plus bête qu'elle n'était car elle s'accrochait à son idéal du bonheur, voulait voir le bien en chacun.

Le jour suivant, à la première heure, Gareth était là. Il tenait à la main un bouquet de fleurs, des gerberas oranges, comme elle aimait. Car, mine de rien, il commençait à bien la connaitre. Et malgré les apparences, il aimait ce petit bout de femme difficile. Cela faisait deux ans qu'ils étaient mariés. Cela s'était fait sur un coup de tête, pour lui ; mais elle planifiait tout depuis des années déjà. A l'époque, il n'en avait pas eu grand chose à faire. Etre marié ou pas, ça ne changeait rien à ses affaires. A part qu'il y avait une personne de plus de vulnérable dans son entourage. Mais il pouvait très bien protéger ce frêle petit bout de femme.
Et puis, au fil des mois, il avait appris à l'apprivoiser. Au bout d'un an, il avait voulu lui parler de ses activités, mais jamais il n'avait pu. Ce n'était pas le bon moment, non, il pouvait repousser encore un peu...

L'intervention d'une infirmière le sortit de ses pensées. Oui, ben non, elle n'était plus là.
Plus là ? Comment ça plus là ? Sans le savoir, il prit sa voix rauque et son air impérieux. L'infirmière sembla se ratatiner sur place, se tordant les doigts, et raclant du pied le sol. Il la bouscula, poussa la porte de la chambre qui abritait la veille encore sa femme et sa fille. Les tuyaux qui alimentaient encore le bébé en il-ne-savait-quoi avaient été arrachés. Les draps défaits et la fenêtre mal refermée.

L'infirmière avait les mains encore tremblantes après le hurlement animal qui s'était échappé de la gorge de l'homme. La porte était encore ouverte. Le bouquet de gerberas gisait par terre, abandonné là comme le souvenir d'une femme et de son enfant. Les pétales des fleurs les plus âbimées s'étaient détachés du coeur. La fenêtre, poussée par un coup de vent, s'ouvrit brusquement. Les doux pétales oranges furent soudain embarqués dans un tourbillon, soulevés par le courant d'air, comme prenant vie.
L'infirmière tira la porte.


Une maison, vaste et claire, un empire de lumière. Un jardin de la taille d'un timbre poste. Une femme, terrée dans un coin d'une pièce bien trop grande. Dehors, un homme, à la forte carrure, s'apprête à pousser la porte.
Il n'avait pas cherché bien loin. Calliope ne s'aventurait jamais dans des lieux inconnus. Elle vivait dans un petit cercle fermé de personnes et d'endroits, sans jamais s'en éloigner. Aussi le refuge le plus logique qu'elle aurait pu trouver était bien leur maison, toute neuve, achetée avec un argent dont la provenance était douteuse. Mais Calliope avait, une fois de plus, fermé les yeux, se persuadant que non, il avait emprunté la somme à un ami, il voulait seulement lui faire plaisir...

Quelques années plus tard, Calliope et Gareth s'étaient finalement réconciliés. Comme toujours... Et la scène recommençait. Avec de légères variantes... Cette fois, les neuf mois de grossesse s'étaient écoulés paisiblement. Gareth était aux côté de sa femme, lui tenant fermement la main, certainement plus angoissé qu'elle. Un sourire serein étirait les lèvres de la Muse. L'enfant hurla, et, après quelques minutes, il fut présenté aux parents. Tout était en ordre.

Quelques jours plus tard, ils revenaient dans leur maison de lumière, l'un tenant par la main une petite fille brune, encore potelée des rondeurs de la petite enfance ; l'autre portant précautionneusement un couffin. Calliope avait insisté pour appeler ses filles Thalie et Euterpe ; et si cela avait semblé stupide à son mari, il n'avait pas protesté.

A ce moment là, la hanche de Thalie paraissait normale. Si elle avait parfois quelques douleurs, sa démarche encore hésitante n'en était pas affectée.
Déjà, son imagination se développait incroyablement. Elle délectait sa mère de son babillage, enjolivant ses récits à chaque seconde, sans pour autant perdre le fil de l'histoire. C'étaient des vampires, qui lui avaient juré qu'ils la mangeraient si elle n'enterrait pas chaque jour un bout de pain dans le jardin. C'étaient des contes qu'elle inventait, des histoire fantastiques. C'étaient des chevaliers sauvant leurs princesses, des aventures épique, des rois se mêlant à des sorcières.

La première réaction de la petite fille face à sa soeur fut de l'indifférence. Cette sorte de chose à peine plus grosse qu'une peluche, toute ridée n'avait pas grand intérêt. Enfin, beaucoup moins en tout cas que ce qu'il se passait dans sa tête.
Puis un mois passa et Calliope trouva de plus en plus souvent son aînée auprès du berceau du bébé. Après tout, tant qu'à devoir raconter des histoires, autant avoir un public aussi calme et attentionné. Sa soeur, au moins, était prête à lui sourire en récompense - et à lui baver dessus.

Elles grandirent. Thalie entra à l'école maternelle, tardivement. Elle ravit tout d'abord les autres enfants par ses histoires. A l'heure de la sieste, aucun ne dormait, préférant rejoindre le groupe assis en rond autour d'elle pour l'écouter. Puis, comme tous les enfants, ils finirent par se lasser. Quelque chose d'autre attira leur attention, et Thalie se retrouva seule avec sa peluche.

A quatre ans, Thalie commençait déjà à ressentir un avant goût des sentiments complexes des plus grand. Et comme il est rare de trouver le désir de vengeance dans le coeur d'un enfant de cet âge, celui de Thalie n'en était pas moins teinté d'amertume. Ainsi, on lui tournait le dos ; ainsi, ses histoire n'intéressaient plus personne ?

Moins d'une semaine plus tard, l'institutrice remarqua de légères tensions à la récréation. Doux euphémisme résumant une situation assez semblable à ce qui suit.

Les enfants étaient dispersés dans la vaste cour, chacun tournant le dos aux autres d'un air renfrogné. Il n'y avait pas de groupes, pas de jeux ni de rire. Le silence planait, lourd, interrompu seulement par le bruit de la civilisation car, au dehors, le monde suivait toujours son cours. Autour de chaque enfant solitaire semblait être érigé un périmètre de sécurité, une sorte de barrière invisible qui les éloignait les uns des autres.

Lorsque l'institutrice les appela en classe, il n'y eut pas un bruit, pas une bousculade. L'un après l'autre, ils se dirigeaient vers la porte de la salle, prenant soin de ne pas passer trop près d'un camarade. Ils entrèrent ainsi au compte-gouttes, car ils veillaient à ne jamais s'approcher à moins d'un mètre d'un autre enfant, quitte à attendre plusieurs minutes avant d'entrer pour ne pas se frôler en prenant le risque de faire la queue.

L'institutrice fit sa petite enquête, mais ne remonta jamais jusqu'à Thalie. En tout cas, celui qui avait orchestré cette scène devait être un fameux semeur de zizanie. Il semblait qu'il avait susuré aux oreilles des enfants des idées, évoqué des paroles qui n'avaient pourtant jamais été prononcées.
Enfin, chacun se pardonna ses torts et on oublia bien vite.

L'étonnante faculté que pouvaient avoir les enfants - tout comme les adultes d'ailleurs - à se désintéresser d'une chose frappait Thalie. Quoi qu'elle fasse pour attirer l'attention, on en parlait quelques jours avant d'oublier. Et si, à cette époque là, les traits de caractères de la petite fille n'étaient pas très bien marqués, et encore très maléables, cet indifférence lui inspirait un certain agacement. Heureusement, elle n'avait plus qu'un an à les supporter, avant de passer "chez les grands".

Chez elle, elle était toujours l'adorable Blanche Neige naïve et innocente. Chacun d'entre nous a une sorte de double personnalité, selon la compagnie et l'environnement que l'on a. Cela se traduit nettement chez les adolescents qui ont un comportement radicalement différent entre le lycée et la maison.
(Hop, un p'tit coup de psy Razz) Mais à quatre ans est-ce vraiment probable ?

Si ses camarades étaient peu impressionnés, elle ravissait sa petite soeur. Son père, lui, n'était jamais assez présent à la maison pour découvrir le talent de sa fille. Et les rares fois où il passait la soirée avec ses trois petites femmes, il ne souhaitait que se reposer et la faisait taire. Calliope, elle, regardait sa petite famille évoluer avec un air distant et un sourire serein. C'était une rêveuse, au doux visage lunaire. Elle ne semblait pas faite pour les choses aussi matérielles que pouvaient procurer une famille, mais son amour maladroit pour ses enfants était tout aussi touchant que celui de n'importe quelle mère.

Les deux enfants grandirent. Peu à peu, Thalie se détacha de sa soeur. Ce n'était qu'un bébé, tandis qu'elle devenait une grande fille ! La preuve : elle entrait à l'école primaire, tandis qu'Euterpe découvrait à peine les joies de la maternelle. Et si aucun autre incident tel que celui deux ans plus tôt ne se produisit cette année là, ses instituteurs ne savaient quoi penser. Cette enfant restait à l'écart, parfois complètement dans la lune, renfermée. Mais dès qu'on lui proposait de raconter une histoire, elle s'illumina et devenait la plus sociable et la plus adorable des petites filles.
Apparemment, elle avait abandonné l'idée de régner sur la cour d'école grâce à ses belles paroles, et préférait s'isoler. Pour ses sept ans, elle refusa que sa mère organise un goûter d'anniversaire avec "tous ses petits amis". De toute façon, elle savait très bien que Calliope aurait préféré faire n'importe quoi au monde que d'avoir à surveiller des gamins morveux. Et d'autre part, elle n'avait un véritable anniversaire que tous les quatre ans, étant née un vingt-neuf février. En fait, elle n'avait que deux ans !

Une autre année passa. Euterpe avait cinq ans, et commençait à être un véritable compagnon de jeu pour Thalie. Ce n'était plus ce bébé qu'il ne fallait pas abîmer. Elle n'en avait plus rien à fiche, maintenant, de lui casser la tête en la laissant tomber. Malheureusement, si elles jouaient bien à des jeux classiques, impossible d'entraîner Euterpe dans d'énormes bêtises. A cet âge déjà, la cadette ne supportait pas l'aventure et l'interdit. On pouvait jouer aux gendarmes et aux voleurs, oui, mais à quoi bon renverser de la peinture sur le manteau préféré de maman ? Et puis, mieux vallait s'asseoir dans la chambre et écouter les histoires de Thalie plutôt que d'aller se salir au terrain vague, non ?

Responsable jusqu'au bout des doigts, le comique d'Euterpe avait ses limites. Très restreintes.

Calliope racontait souvent qu'un soir, quand Euterpe n'était encore qu'un bébé, elle lui lisait le conte de Blanche Neige. Lorsqu'elle en était arrivée à la description de l'héroïne, Euterpe avait cessé d'écouter sa mère pour tendre les bras vers sa soeur, articulant un "beuyah" très expressif. Depuis ce jour-là, on avait attribué "Blanche Neige" comme surnom à l'aînée des deux filles. Mais, en fait de Blanche Neige, elle ne ressemblait pas beaucoup à cette princesse de conte. A vrai dire, si elle avait eu à vivre parmis des nains, elle aurait appelé des déménageurs pour agrandir la maison. Passer le balai courbée en deux, c'était bien gentil mais de un, cela aurait été aux nains de faire les femmes de maison, et de deux la position pliée était loin d'être agréable.
Si ce sobriquet était bien mignon, ceux que lui attribuaient ses camarades l'étaient moins. Une boîteuse solitaire, une mythomane, qui passait son temps à raconter des bobards ! Elle ne valait pas la peine qu'on s'intéresse à elle, du moins tant que ce n'était pas pour la dénigrer. Elle était à cette époque de la vie où les enfants deviennent cruels. Ils apprennent la méchanceté, les mots qui blessent.

Thalie, elle, était bien loin de tout cela. C'était comme si elle était déjà passée par cette époque, et qu'elle n'aspirait plus qu'à être normale. Sa soeur étant barbante à souhaits, elle avait du dénicher un ou deux amis avec qui faire les quatre cents coups. Ils s'offusquaient de ne la voir pas réagir face aux insultes, de ce contenter d'un haussement d'épaule méprisant. Mais ils l'admiraient également pour cela, et Thalie se rengorgeait chaque fois qu'elle voyait dans leur regard une preuve de leur foi sans limites en elle.
Le premier jugement qu'avaient porté ses professeurs sur elle s'était avéré assez juste. Elle se plaisait à observer son reflet, à se prendre de passion pour cette image sans corps. Puis, au fil des jours, en plus de son apparence elle aima sa façon d'être. L'admiration des autres la flattait, mais ils en témoignaient malheureusement trop peu.



Dernière édition par Thalie Alann le Ven 14 Mar - 23:18, édité 9 fois (Raison : Il faut bien la finir, cette fiche ! xD)
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptyVen 14 Mar - 23:20

Euterpe était une fille adorable. Trop, d'ailleurs. Et derrière ce nom barbare se cachait une petite fille modèle, de celles que l'on prétend rêver sans pouvoir les supporter quand on se retrouve en face de l'une d'elles. Et, en tant que soeur, elle était encore plus insupportable, affichant la perfection et soulignant ainsi les défauts de Thalie. Lorsque sonnèrent les dix ans de l'aînée, les relations des deux soeurs se firent houleuses. La petite atteignait l'âge de raison, et devenait peu à peu une parfaite ménagère. Elle secondait Calliope dans la cuisine, passait volontiers un coup de balai et mettait la table avec le sourire ; tant de choses qui faisaient défaut à Thalie. Celle-ci ne s'intéressait pas aux choses bassement matérielles qu'étaient les taches à la maison. En un an, elle s'était créé un monde à elle ; un monde dont elle était le centre, la vie et la matière. Elle n'était pas "dans son" monde, elle était son monde. Et ce monde tolérait de moins en moins la présence d'une petite soeur. Aussi Thalie s'éloignait-elle de sa cadette. Le temps qu'elle cessa de passer à lui raconter des histoires, elle l'utilisa pour rester dans sa chambre. Petit à petit, au lieu de raconter des contes oraux, elle se mit à écrire. Au bout de quelques semaines, écrire était devenu sa seconde nature, une chose naturelle qu'elle faisait sans y penser, comme respirer. C'était comme si son cerveau était connecté directement à sa main.

Lorsqu'elle ressentait le réel besoin de faire une bêtise, elle quittait sans remords son sanctuaire, pour retrouver des "amis" au terrain de jeu. Elle aimait les impressionner, faire des choses qu'il ne fallait pas simplement pour lire le respect dans leurs regards.


Calliope n'imaginait même pas punir ses enfants ; et quand Thalie rentrait boueuse, mais avec un air de triomphe, sa mère ne disait rien. Elle pensait et était vaguement heureuse que sa fille soit enfin une enfant normale qui se traîne dans la boue avec une bande de gamins.

Quelques mois passèrent, et aux vacances d'été succéda la rentrée. La sixième commençait pour Thalie, dans un collège mortellement ennuyeux. Le respect, ou du moins l'indifférence qu'elle avait gagné dans son école n'existait plus ici, et c'est sans protection aucune qu'elle fit son entrée dans un monde qu'elle avait rêvé, y croyant les élèves plus matûres.

Quelques mois de collèges ne sont pas intéressants à décrire. De plus, nous supposons que vous avez également du subir cette épreuve, et passerons sur cette période pour en arriver à la plus importante.

Février touchait à sa fin. Un pseudo-anniversaire fut célébré en l'honneur de Thalie, le vingt-huit février. L'année prochaine, enfin, elle aurait droit à la véritable date. Au fond, elle n'en avait cure. Un anniversaire, pas d'anniversaire, quelle importance ?

Mars débuta, avec ses chauds et ses froids. Un nouveau trimestre gris s'acheva dans un collège gris. Thalie n'était pas faite pour la vie d'étudiante.
Un week end, Gareth avait enfin réussi à se libérer - Thalie ne savait pas ce qu'il faisait, mais il n'était jamais là, toujours à courir d'un bout de la ville à l'autre - et avait décidé subitement d'emmener sa famille au ski. Calliope l'avait regardé de ses yeux tristes, semblables à deux tourbillons dans lesquels s'affrontaient éternellement l'ombre et la lumière. Cette escapade soudaine ressemblait plus à une fuite qu'à autre chose, mais elle ne fit pas de commentaire, et, de son sourire triste, empaqueta les affaires des filles.

Les routes de montagnes étaient étroites, les virages en tête d'épingle. On découvrit l'une des failles d'Euterpe : elle se sentait mal en voiture. Thalie, elle, indifférente à l'agitation générale, collait sa joue contre la vitre glaciale. Ses mains bleutées étaient serrées contre son ventre. Il n'y avait pas de chauffage, dans cette voiture. Son père avait annoncé un jour qu'il avait racheté la voiture à un ami, et elles l'avaient accepté.
Gareth s'arrêta finalement sur une bande d'arrêt d'urgence, pour laisser à sa fille l'occasion de se dévider de son petit-déjeuner. Le hasard, et également le fait que Gareth Alann possédait peut-être un faux permis de conduire, firent que la bande d'arrêt d'urgence était placée au détour d'un virage, et que la voiture empiétait légèrement sur la route. Le hasard également plaça là un fou du volant qui, prenant son virage trop vite, percuta de plein fouet le véhicule arrêté sur le bas-côté.

Si Euterpe était sortie de la voiture pour laisser son estomac se récrier en paix, Thalie, Calliope et son mari étaient restés à l'intérieur. Le véhicule dévala le ravin, culbuta plusieurs fois avant de s'écraser, sur le flanc, éventré. Le hurlement de la petite fille restée sur la bute retentit, mais celui qui avait provoqué l'accident avait déjà filé.

Une demi-heure passa. Euterpe n'avait pas osé dévaller la colline pour aller chercher une trace de vie sous la carcasse brûlée de la voiture. Elle restait debout, à se tordre les mains.

Le responsable de cette désolation avait-il eu quelque remord ? Quelqu'un avait-il assisté à l'accident depuis l'autre flan de la montagne ? Toujours est-il qu'une sirène se fit entendre au loin ; un camion rouge suivi d'une voiture bleue apparurent dans le champ de vision de la petite fille. Le reste fut flou.

Un mois plus tard, ils étaient de retour chez eux. Thalie s'était réveillée à l'hôpital. Elle avait seulement un bandage au pied, un bras dans le plâtre et quelques égratinures. Il n'y avait pas de miroir dans la chambre, et sur le coup le bilan lui parut positif. Non pas qu'elle avait peur de la mort, mais elle n'avait pas encore fait son temps.
Puis, quand les médecins avaient défait son bandage et qu'elle avait aperçu son moignon à la place du gros orteil, elle avait prit peur. Son pied diforme, cet horrible vide à la place de l'orteil, sa chair à nu... Tout cela gachait sa beauté, entachait sa perfection.

Puis elle vit l'état de son père : il avait été gravement atteint à la tête, était devenu un légume, n'avait pas plus de jugeotte qu'une courgette. L'état de sa mère, si il était peut-être plus à plaindre, était déjà moins encombrant pour les autres. Morte et enterrée, on aurait au moins pas à la prendre en charge et à lui donner le biberon. Et puis il y avait pire : Euterpe. Si Thalie avait pensé qu'elle était insupportable avant, l'accident l'avait rendue totalement incontrôlable. Maniaque, maman poule, et se voulant chaleureuse, elle avait développé tous les symptomes de la mère protectrice. Et cela à huit ans : elle devait avoir un instinct maternel bien ancré. Peut-être tentait-elle de remplacer Calliope. Si c'était le cas, l'aînée se demandait si il ne valait pas mieux regretter leur mère. Elle préférait encore l'air lointain et le sourire distant de l'Eloquence à la frénésie hyperactive de la Musique.

Si Thalie versa des larmes, ce fut certainement plus pour son pied que pour la perte de sa mère. Elle fit de la rééducation durant quelques semaines, et, les mois qui suivirent, du subir des massages toutes les semaines. Prendre son père en charge finit par lui taper sur les nerfs ; elle laissa le travail à sa soeur. Bientôt, elle passa ses journées enfermée dans sa chambre à écrire et à s'admirer dans son miroir fendu, séchant le collège où elle n'avait rien à faire. Euterpe, après tout, ne pouvait pas la rappeler à l'ordre puisqu'elle était à l'école, et Gareth ne remarquait certainement rien.

Un autre mois passa. Une lettre atterrit dans la boîte, marquée du nom de Thalie.


« Si vous recevez cette lettre, c’est que vous êtes pressenti pour devenir un grand du Mal.

Que ce soit par vos parents illustres, par un casier judiciaire que vous avez déjà commencé à remplir, ou par une ambition qui a su capter l’attention de certaines personnes, vous avez été remarqué. Et vous allez devenir remarquable.

L’ « Ecole du Flux » ... vous ne la connaissez pas. Vous allez en faire votre nouveau foyer. Vous allez y trouver les meilleurs et les plus mauvais professeurs, vous allez y apprendre tout ce qui pourrait faire de vous quelqu’un de… maléfique. Nos formations sont les plus évoluées, et il n’y a rien de mieux que les études communes pour se trouver quelques camarades pour monter des alliances.

A notre époque, les enfants du Mal sont orphelins de leur monde. Vous le savez très bien, j’en suis certain. Vous savez que les gens débordent de bons sentiments, et que les jeunes font traverser les grands-mères sur les passages piétons. Mais ce temps est révolu : vous allez grandir, vous allez peut-être même devenir Maître du Monde, et le chaos et les ténèbres vont vous accompagner. Vous pouvez vous offrir cet avenir, vous pouvez obtenir gloire et puissance, devenir des êtres extraordinaires : il vous suffit de rejoindre les bancs de l’Ecole.

En renvoyant votre formulaire d’inscription, vous serez dans les registres de l’Ecole du Flux… et vous serez attendu à la rentrée. Selon le péché vers lequel votre âme penche le plus, votre couleur vous sera attribuée, et, sous les regards attentifs de vos mentors, vous apprendrez à maîtriser le pouvoir que je vous aurai offert.

Chers élèves, j’espère que vos études vous fourniront tout ce que vous désirez, et je vous souhaite la bienvenue dans le côté obscur de la force…

N’oubliez pas : faites le Mal, et faites-le bien.


Caliban Leviaz, Directeur »

A cette annonce, pas de réaction. Si ça pouvait être plus intéressant que le collège, alors elle ne disait pas non.

Vint la rentrée. Thalie observait l'hélicoptère qui était supposé l'emmener d'un air vide. Si elle avait pu penser quelque chose, elle aurait sûrement été surprise de ne pas se retrouver dans une école "old fashion", une sorte d'internat. Apparemment, c'était moderne, par là bas. Qui vivrait verrait...

Elle était assise, et fixait tranquillement l'homme en face d'elle. Elle avait regardé d'un air atone le rayon bleu filant vers son front, mais une moue était tout de même apparue sur ses lèvres en réponse à la sensation étrange qui lui donnait l'impression que l'on vidait les tiroirs de son esprit sur le sol. Celui qui se disait être le Directeur lui annonça qu'il avait choisi son péché. Luxure. Une lueur d'étonnement glissa dans les yeux bleus de l'enfant.
Lorsqu'elle lui tendit son poignet, l'esprit de Thalie était plein d'interrogations. Ceux qui avaient cru qu'elle ne savait pas penser, rien éprouver se trompaient. Il lui arrivait de réfléchir.

La brève, mais néanmoins vive douleur qui traversa son cerveau mit fin aux multiples questions, comme un fil coupé par un net coup de rasoir. Ainsi, c'était cela son arme ? Cette sensation de puissance, de supériorité était-elle vraiment liée à son pouvoir ? Peut-être se rendait-elle compte qu'elle allait pouvoir dominer ? Qu'elle sortirait de cette école plus puissante que jamais, qu'elle inspirerait le respect, qu'elle pourrait punir ceux qui lui feraient offense.

En sortant du bureau du Directeur, accompagnée par une élève plus âgée à la cravate orangée, Thalie se massait la main, l'air ailleurs. Sur le dos de sa main, tout près du poignet, était apparu un symbole étrange.

Thalie découvrit ce qu'était finalement l'école du Flux. Durant sa première année, elle discerna, en même temps que ses camarades, les premiers symptomes de son pouvoir. Elle aurait pu être déçue : son pouvoir, contrairement à ceux de certains, ne s'annonçait pas dévastateur. Il n'avait même, en apparence, aucune utilité. Certains n'auraient pas vu en quoi produire des formes floues et sans contour pourraient être utile. Mais soit Thalie y voyait un sombre dessein, une utilité future, soit elle s'en fichait.

Les vacances arrivèrent plus vite qu'elle ne l'avait cru. Il s'avérait que l'Ecole du Flux se révélait plus intéressante que son vieux collège de quartier, puisque le temps y passait plus vite. Après deux mois passés dans sa chambre, loin de sa mère par procuration et du légume qui lui servait de père, c'était presque de la sérénité que ressentit Thalie en retrouvant l'hélicoptère.

Durant l'année suivante, alors qu'elle apprenait à perfectionner son pouvoir, elle remarqua que son monde devenait bien sombre. Le orange de sa cravate lui avait semblé plus vif, la première fois qu'elle l'avait vu. Mais les sortes d'illusions qu'elle provoquait devenaient plus nettes, plus précises. Vers la fin de l'année, on pouvait reconnaitre les formes les plus simples, mais elles ne donnaient aucune impression de réalité, nuages éphémères.

Plus les hologrammes devenaient réels, détaillés, plus les couleurs et la lumière disparaissaient du monde de Thalie. L'été entre sa quatrième et sa cinquième année, Euterpe l'emmena voir un ophtalmologue. En deux jours, Thalie s'était cognée dix-huit fois dans la table en verre, quinze fois contre son lit, elle avait cassé cinq assiettes et deux verres, et s'était assise un nombre incalculable de fois dans le vide. Le médecin avait observé, incrédule, les yeux de Thalie ; il lui avait fait subir divers test. Il lui avait finalement recommandé de porter des lunettes correctrices, sans avoir l'air de vraiment y croire.

Au bout de deux mois, les lunettes se retrouvèrent quelque part, sous le lit que Thalie occupait dans le dortoir de la Luxure, ou peut-être au fin fond de sa valise. Inutiles.

Si son caractère ne semblait pas le moins du monde influencé par les cours qu'elle suivait, son pouvoir, lui, progressait à une allure fulgurante. Au milieu de sa cinquième année, alors que Thalie était en train de rédiger un devoir pour la professeur de Torture, Selena Rhyn apparut soudain, assise sur la table les jambes croisées. Le seul élève présent s'enfuit en courant, voyant la professeur apparaitre ainsi de nulle part. Thalie fut déconcentrée par son hurlement, et l'illusion disparut, sans un bruit. Mais elle avait réussi, enfin, à créer une image presque parfaite ; et c'est un demi-sourire aux lèvres qu'elle revint à sa feuille de papier.

Les grandes vacances vinrent. Une fois encore, elle resta enfermée. Peu furent ceux qui virent le progrès de son pouvoir : c'était une sorte de secret que seul son miroir partageait. Sa dernière année allait commencer. Elle ne voyait plus qu'un monde gris foncé...

______


« Il vit une source ; elle était claire et argentée et n'avait encore jamais été touchée par un troupeau, ou des oiseaux, ou des bêtes sauvages, ni même par des branches tombées des arbres, qui l'ombrageaient ; et, comme épuisé de fatigue, il s'était laissé tomber sur l'herbe, pour étancher sa soif, il tomba amoureux de sa propre image, reflétée dans l'eau. Il commença par essayer de saisir et d'embrasser le beau jeune homme qui se trouvait devant lui, mais il se reconnut lui-même et, transporté d'amour, resta couché à regarder dans l'eau pendant des heures.

Comment supporter à la fois de posséder et de ne pas posséder ? Il était miné par le chagrin et, cependant, il se réjouissait de son tourment ; il sut au moins que son autre moi lui restait fidèle, quoi qu'il arrive.

Écho, bien qu'elle n'eût pas pardonné à Narcisse, souffrait avec lui ; elle répéta en écho à sa voix : " Hélas ! Hélas ! ", comme il se plongeait un poignard dans sa poitrine ; et elle redit aussi sa dernière phrase au moment où il expirait : " Ô toi, jeune homme que j'ai vainement aimé, adieu ! "

Son sang s'écoula dans la terre et il naquit un narcisse blanc à corolle rouge.
»


Le mythe de Narcisse, Extrait des Métamorphose, Ovide.


Dernière édition par Thalie Alann le Dim 16 Mar - 18:01, édité 4 fois
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptySam 15 Mar - 2:07

Voilà, la première partie est terminée ! Smile
Mine de rien, il me restera encore six ans de sa vie à écrire, mais j'aurais besoin du pêché pour cela, alors j'attends votre verdict ! Wink
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptySam 15 Mar - 19:17

Super Razz !

Bon, je vais lancer le débat, mais en prévision d'une éventuelle couleur orange, je dois te dire quelque chose... rares sont les élèves que nous amenons à la Luxure par leur envie de faire des choses qui pourraient... t'embêter x). Ceux que nous mettons à la Luxure ont une passion. Que ce soit de l'Art, de l'Amour, ou quelque chose de plus physique, celui qui est à la Luxure entre dans une spirale égoïste pour se plonger dans sa passion.

... et... comme Thalie aurait, d'après moi, sa place ici (dans la Gourmandise et dans l'Orgueil aussi, remarque), je préfère te rassurer ^^.
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptySam 15 Mar - 19:56

Oui, c'est ce que j'ai remarqué, cette réflexion avait été écrite au tout début de la fiche ^^

(Thalie à la Gourmandise ? oO Luxure, encore, je peux concevoir pourquoi, mais Gourmandise... n_n)
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptySam 15 Mar - 20:59

Bon, ça va, au cas où on ne te choquera pas x).

Oui, je pense aussi Gourmandise parce qu'elle a un rapport avec la réalité très étrange. Je ne dirais pas qu'elle la fuit, mais en tous cas, il est certain qu'elle est coupée du monde, à cause de son regard sur elle-même et de l'écriture... surtout avec le contraste que sa soeur offre.

Enfin bon Razz. Reste à déterminer si c'est sa fuite du monde qui motive sa passion, ou le contraire... et voilà qu'avec ce que je t'écris, je sais XD.
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptySam 15 Mar - 23:56

Et voilà, on a fait notre boulot (et ta fiche est très appréciée Razz) !

Bonne chance pour tes six dernières années XD !
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptyDim 16 Mar - 15:36

Six années écrites, mon commandant !
C'est votre dernier mot ? Luxure sera ?
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MessageSujet: Re: Thalie Alann   Thalie Alann EmptyDim 16 Mar - 17:56

C'est mon dernier mot, je vois que nous ne nous sommes pas trompées Twisted Evil.
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